C’était le vendredi 14 décembre 2018 à l’Hôpital Mère et Enfant. Ce jour là, le Président Abdelaziz était venu visiter cet hôpital, une institution sanitaire au service de la maman et de l’enfant. J’étais là, pour autre chose. Ma sœur qui m’avait réveillé tard la nuit était admise dans cet hôpital. Elle y accoucha d’une jolie petite fille. Quelques heures avant l’arrivée du Président, nous avons, avec un très grand étonnement, assisté à un remue-ménage indescriptible.
Le personnel de l’hôpital, en un laps de temps très court, avait requinqué les lieux. Tout ce qui est vieux et crasseux avait disparu. Des nouvelles chaises ont apparu ; revêtus de draps neufs, les lits des patientes arboraient un air plus satisfaisant. Et tout ça sous la supervision des responsables des lieux et ceux qui sont venus pour s’assurer que tout est en ordre pour bien accueillir le Président. Et surtout, tout avait été mis en œuvre pour faire voir au Président ce qu’on voulait qu’il voit. Tout cela peut paraitre pour certains normal.
Mais seulement, à peine le Président parti, les draps ont été retirés des lits des malades ; sans doute pour montrer que le temps consacré pour un environnement sain dans cet hôpital était épuisé. Cette scène dans un centre de santé, de surcroit un hôpital aussi important, peut être inimaginable, mais ce vendredi 14 décembre 2108, les hommes et femmes en blouses blanches n’ont pas sourcillé dans l’accomplissement de cette mesquinerie malsaine.
Le personnel de santé de cet hôpital semble nous dire : « Soyons propres et dans un environnement sain et pur pour le Président, mais restons nous-mêmes dès son départ pour ces pauvres gens alités » (des patientes en attente d’accoucher ou alitées après accouchement) ; mais, a-t-on seulement besoin de le dire, quand on voit toute cette crasse, quand on respire cette puanteur avec tout ce désordre repoussant où les accompagnants, malades et cafards se disputent les lieux.
Dites vous bien qu’on est dans le décor d’une élite particulière : le summum de la propreté, les instruits du serment d’Hippocrate. Des hommes et des femmes qui ont en charge notre santé. La santé infanto-maternelle - le début ou la fin de la vie.
L’hôpital Mère et Enfant, c’est le temple de suivi et de veille sur la procréation en Mauritanie. Les médecins de cet hôpital ont comme mission entre autre d’assurer une bonne naissance, donc en charge de la vie du bébé et de sa mère. La vie. Un domaine qui ne peut s’accommoder de la triche et de l’improvisation.
Le mauritanicus (homme mauritanien) se croit obligé de mentir, de tricher et cela même à l’hôpital. Mais seulement on retient que le mensonge est contagieux et que le faux ne peut engendrer que le faux. On ne pouvait penser que nos médecins ne font pas exception à la règle, cette règle qu’on mauritanise… du mensonge à l’hypocrisie. Une façon de faire de cette élite qui a sacrifié la Mauritanie.
On sait déjà qu’en Mauritanie, il n’est pas bon de tomber malade, car si tu n’as pas le moyen d’aller de l’autre coté du fleuve (à Richard Toll, petite ville sénégalaise) on risque d’être l’objet des faux diagnostics ou de servir de réceptacle des faux médicaments.
Les tenants du pouvoir, eux, ne se soignent pas ici, et ce sont eux qui ont en charge la bonne marche de notre système sanitaire.