[02/11/2018]    

« Je suis l’Algérie toute entière !»



(Ecofin Hebdo) - Il est né et a grandi au Maroc, à Oujda. A 19 ans il rejoint la branche armée du FLN algérien. A 21 ans, il devient le secrétaire particulier de Houari Boumediène. A 25 ans, il est député, puis ministre de la jeunesse. A 26 ans, il est le chef de la diplomatie algérienne. Il faut retracer le parcours hors normes d’Abdelaziz Bouteflika pour comprendre la place démesurée que cet homme occupe, même physiquement diminué, dans la vie politique de l’Algérie.

En Algérie, Djamel Ould Abbes, secrétaire général du parti au pouvoir, le front de libération national (FLN), a déclaré le 28 octobre dernier que le chef de l'État, 81 ans, serait le candidat du parti. Cette déclaration, loin d’être une annonce officielle, a quand même semé le désarroi dans les rangs de l’opposition. Si la présidence n’a jusque-là fait aucune déclaration officielle, tous les observateurs sont en alerte, conscients, voire convaincus, que la candidature du président pourrait, comme en 2014, intervenir dans les derniers jours du délai accordé aux présidentiables. D’autant plus que le président s’est rendu hier, 1er novembre, sur la tombe des martyrs de la guerre d’indépendance algérienne, histoire de bien rappeler à tout le monde qu’il est encore là.



Vieillesse ennemie

« Je suis le représentant du peuple algérien et aucune institution de la république ne peut faire une bouchée de moi. Je suis l’Algérie toute entière », avait déclaré, en 1999, Abdelaziz Bouteflika au forum de Crans-Montana, en Suisse.

« Je suis le représentant du peuple algérien et aucune institution de la république ne peut faire une bouchée de moi. Je suis l’Algérie toute entière.»

Les Algériens d’une certaine génération se souviennent encore de ces propos, prononcés par un président aux antipodes de l’image qu’il offre aujourd’hui. Avant 2013 et son accident vasculaire cérébral, Abdelaziz Bouteflika n’était pas l’homme physiquement amoindri qu’il est maintenant.


Ministre des Affaires étrangères à 26 ans.



L’interlocuteur charismatique a laissé place à un vieil homme évitant les apparitions publiques qui pourraient révéler l’ampleur de ses problèmes de santé. L’homme politique fougueux d’il y a quelques années ne peut plus gérer le pays que par personnes interposées. On oublierait presque qu’à une époque, celui qui voulait être le Charles de Gaulle algérien, s’était fait une réputation de mondain amateur de femmes et de cigares. Le tout en restant très actif dans les différents épisodes ayant marqué la politique algérienne depuis la guerre d’indépendance.



Ministre à 25 ans

Il est né le 2 mars 1937 à Oujda, une ville marocaine où ses parents avaient émigré. Il y fera ses études avant de rejoindre, à l'âge de 19 ans, la branche armée du FLN qui avait demandé, en 1956, à tous les lycéens algériens de rejoindre le combat pour l’indépendance. Abdelaziz Bouteflika intègre alors l’armée des frontières dont les bases sont installées sur le territoire marocain. Le natif de Ouijda suit ensuite l'instruction militaire de l’école des cadres de l’Armée de Libération Nationale (ALN) à Dar El Kebdani. Quelques semaines plus tard, il devient contrôleur pour la direction de la wilaya 5. Son travail consiste alors à convaincre les populations rurales algériennes de rejoindre les forces de l’ALN. Il l’effectuera jusqu’en 1958. C’est à cette époque qu’il est repéré par celui qui dirige la wilaya 5 : Houari Boumediène.

Son travail consiste alors à convaincre les populations rurales algériennes de rejoindre les forces de l’ALN. Il l’effectuera jusqu’en 1958. C’est à cette époque qu’il est repéré par celui qui dirige la wilaya 5 : Houari Boumediène.

Ce dernier fait d’Abdelaziz Bouteflika son secrétaire particulier. Après la guerre, il connaît, dans le sillage d’Houari Boumediène, une ascension fulgurante. En 1962, Abdelaziz Bouteflika devient, député à l'Assemblée constituante avant d’être nommé, à l'âge de 25 ans, ministre de la jeunesse, des sports et du tourisme.


Des talents de négociateur hors-pair.



Quelques semaines plus tard, il devient à 26 ans, le plus jeune ministre des affaires étrangères de l’époque. Pourtant, des dissensions internes le feront limoger le 28 mai 1965 par le président Ahmed Ben Bella. Malheureusement pour ce dernier, cette décision entrainera sa chute. Le 19 juin, Houari Boumediène prend le pouvoir après un coup d’Etat et rend à Abdelaziz Bouteflika son poste aux affaires étrangères. Ce dernier l’occupera pendant les 13 années suivantes.

Des dissensions internes le feront limoger le 28 mai 1965 par le président Ahmed Ben Bella. Malheureusement pour ce dernier, cette décision entrainera sa chute.

A une époque où l'Algérie, à la tête des pays non alignés, se fait le porte-parole du tiers-monde, son ministre des affaires étrangères se signale par des prises de paroles remarquées et des talents de négociateur hors-pair.

En 1975, par exemple, lorsqu’Illitch Ramirez Sanchez, dit Carlos, un terroriste, prend en otages des ministres de pays membres de l'OPEP, c’est Abdelaziz Bouteflika qui obtient des ravisseurs qu’ils se rendent et libèrent les otages. L'ambassadeur américain à Alger de l’époque rapporte une gestion de « efficace, détendue et cool » de cette situation.


Une réputation de mondain, amateur de femmes et de cigares.



Abdelaziz Bouteflika sera également crédité de la conclusion avec la France, de l’accord du 27 décembre 1968 définissant des conditions de circulation, d’emploi et de séjour des ressortissants algériens dans l’hexagone.



L’exil suisse avant la présidence

En 1978, Houari Boumediène décède, emporté par la maladie de Waldenström. Les ennuis vont alors débuter pour son protégé qui se trouve livré à lui-même. Il est dans un premier temps nommé ministre d’Etat par Chadli Bendjedid.

Pourtant, en 1981, il doit quitter ses fonctions de ministre des affaires étrangères et rendre compte de sa gestion à la Cour des comptes, qui l’accuse de malversation financière et de détournement de fonds.

En 1981, il doit quitter ses fonctions de ministre des affaires étrangères et rendre compte de sa gestion à la Cour des comptes, qui l’accuse de malversation financière et de détournement de fonds.

Condamné dans cette affaire, Bouteflika choisit d’être exilé en Suisse. Il revient en Algérie 6 années plus tard. Le pays est alors en proie à de vives tensions sociales. Les manifestations se font plus violentes, à l’instar de leur répression. La situation ne sera décantée que par la prise du pouvoir par les forces armées nationales. Prudent, Abdelaziz Bouteflika se tient loin de la politique. Il refuse même de devenir chef d’Etat, en 1994, lorsque les militaires lui proposent le fauteuil. Finalement, il se présentera en « candidat indépendant » aux élections de 1999. Mais quelques jours avant l’élection, le FLN le désigne comme candidat. Ses adversaires se retirent alors du scrutin, refusant d’affronter un candidat « téléguidé par les militaires ». Abdelaziz Bouteflika devient président, même si pour certains, il restera « le mal élu ». Le premier mandat de l’ancien ministre des affaires étrangères est marqué par un retour de la paix civile. Abdelaziz Bouteflika conçoit un projet de loi de « concorde nationale » offrant l'amnistie aux islamistes n’ayant pas commis de crimes de sang.

Le premier mandat de l’ancien ministre des affaires étrangères est marqué par un retour de la paix civile. Abdelaziz Bouteflika conçoit un projet de loi de « concorde nationale » offrant l'amnistie aux islamistes n’ayant pas commis de crimes de sang.

Le 5 juillet suivant, pour la fête nationale, 5000 prisonniers islamistes sont libérés. Le projet de loi du président passera haut la main l’examen du référendum (98%). La réconciliation semble actée.

Pourtant, en 2001, la population kabyle réclame la reconnaissance de la langue amazigh et de nouvelles émeutes éclatent, avec les forces de l’ordre cette fois. Le conflit sera réglé en 2002. Les gendarmes quittent la Kabylie, et le Tamazight, la langue berbère devient une langue nationale. Pour faire tenir une unité nationale fragile, Abdelaziz Bouteflika se sert alors de l’identité nationale. Il réclame des excuses à la France pour la colonisation algérienne.

Le président, ancien diplomate, se sert alors de son expérience pour améliorer l’image de l’Algérie à l’international. D’un autre côté l’économie algérienne donne l’impression de s’améliorer et la magie semble alors opérer : Abdelaziz Bouteflika est réélu en 2004.



Un règne sans fin

Finalement, Abdelaziz Bouteflika est également réélu en 2009 et en 2014. Pour y parvenir, il a fait réviser la constitution qui le limitait à deux mandats présidentiels. Progressivement, le régime d’Abdelaziz Bouteflika, qui avait ramené la paix civile, devient de plus en plus répressif. La presse, les manifestations et les opposants se plaignent d’un régime qu’ils qualifient désormais de « dictature ». Le plus inquiétant pourtant reste l’état de santé du président. A plusieurs reprises Abdelaziz Bouteflika s’est fait soigner pendant plusieurs jours d’affilée à l’extérieur du pays. Sa situation sanitaire s’est aggravée en 2013, lorsqu’il a subi un accident vasculaire cérébral. Depuis cet épisode, le président algérien ne semble plus en mesure de se déplacer sans fauteuil roulant. Il s’exprime difficilement et ne donne pas, lors de ses très rares apparitions, l’impression de pouvoir exercer pleinement ses fonctions. Cela ne l’empêchera pas d’être réélu en 2014, alors qu’il n’a assisté à aucun meeting lors de sa campagne pour ce scrutin.

bouteflika grand



On comprend alors aisément pourquoi la probable candidature d’Abdelaziz Bouteflika désespère l’opposition qui demande, depuis quelques années déjà, du changement à la tête de l’Algérie. Seulement, rien ne semble pouvoir empêcher cet homme hors du commun, de remporter les élections.

Servan Ahougnon

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